Nouvelle stratégie européenne de défense : « Terriblement tardive, protectionniste et dirigiste »

Le député fédéral Theo Francken et l’eurodéputé Johan Van Overtveldt émettent de sérieuses réserves quant à la nouvelle stratégie européenne de défense : « Après deux ans, on s’est enfin rendu compte que l’absence d’industrie de défense interne performante représentait une menace existentielle. La Commission européenne va très loin dans ses ambitions alors que nous sommes en fin de législature. Nous craignons que cela n’aboutisse pas », expliquent-ils.

La Commission européenne souhaite renforcer l’industrie de défense de l’UE à court terme, notamment en stimulant les achats conjoints d’armes et en fixant des pourcentages d’investissement dans l’économie européenne. Francken : « La situation est grave et nous devons nous diriger vers un renforcement structurel de nos capacités de défense. Nous devons toutefois adopter une approche plus intégrée dans les cadres existants de l’UE. Je déplore surtout l’absence de volonté de l’Europe d’analyser et de résoudre les problèmes liés à ses propres projets militaires (A400M, NH-90, Eurocopter Tiger et Eurofighter). »

Francken met en garde contre le protectionnisme et doute que l’Europe puisse rivaliser avec l’industrie de défense américaine à court terme. L’efficacité et l’augmentation de la production doivent être les priorités, et l’Europe ne doit pas seulement se montrer chauvine.

1,5 milliard d’euros largement insuffisants

Le financement est par ailleurs fondamental pour un complexe industriel européen compétitif. Les 1,5 milliard d’euros proposés sont largement insuffisants. Les mécanismes de financement alternatifs, comme les obligations de défense communes que le gouvernement Vivaldi préconise, ne sont pas une bonne chose. Francken : « L’UE dispose des ressources nécessaires pour ne pas imposer de charges supplémentaires aux citoyens, mais elle se trompe en fixant ses priorités budgétaires au niveau des fonds de cohésion, par exemple. »

Soutenir les investissements privés

L’eurodéputé Johan Van Overtveldt partage ces préoccupations : « La nouvelle stratégie prévoit un financement ambitieux à partir de 2028. La révision du budget pluriannuel actuel vient pourtant à peine de se terminer, avec un effort minime en matière de défense.  Une certaine cohérence serait la bienvenue... » L’eurodéputé souligne également le dirigisme de la Commission. Van Overtveldt : « Il serait beaucoup plus judicieux pour les États membres d’encourager les investissements privés à travers des primes et des réductions d’impôts ciblées. »

Pierre d’achoppement politique

L’approbation par les différentes capitales constituera elle aussi un défi, les petits pays ne pouvant sans doute jouer qu’un rôle limité dans ce projet. Theo Francken : « J’attends de voir dans quelle mesure les Français sont prêts à acheter européen si ce n’est pas leur projet et les partis wallons à lâcher les armes de la FN Herstal. »

Actifs russes

Van Overtveldt insiste pour finir sur l’urgence du soutien à l’Ukraine et de l’utilisation des avoirs russes gelés. Il appelle à une action concrète et souligne l’importance d’un cadre de coordination en vue d’un financement efficace.