Vous êtes ici
La Belgique risque de se retrouver les mains vides pour la présidence de l’Union européenne

La Belgique ne parvient pas à prendre position sur les nouvelles règles budgétaires européennes. Notre pays risque ainsi de se retrouver les mains vides pour la présidence de l’Union européenne, écrit le ministre flamand du Budget Matthias Diependaele sur tijd.be. « La diplomatie fédérale atteint une nouvelle fois le fond. »
Le débat sur les nouvelles règles budgétaires applicables aux États membres fait rage depuis plusieurs mois sur les places du Luxembourg et Schuman à Bruxelles. Il connaîtra son apothéose lors de la présidence belge du Conseil de l’UE au premier semestre de l’année prochaine, dans un contexte de turbulences économiques, de conflits internationaux et de hausse des taux d’intérêt. Les règles censées conduire à des budgets responsables se retrouvent de plus en plus mises sous pression.
Après la crise bancaire, qui a culminé avec la tragédie grecque de 2010, l’UE avait décidé de redoubler d’efforts. Le pacte de stabilité et de croissance, renforcé et élargi, devait ainsi intégrer les garanties nécessaires dans le système budgétaire et renforcer les critères de Maastricht. Tout le monde s’accordait alors à dire que nous ne pouvions pas nous permettre de voir le scénario grec se répéter.
Malheureusement, les souvenirs ne sont qu’éphémères. La reprise économique, les taux d’intérêt faibles et la politique monétaire laxiste de l’UE ont débouché sur un nouvel adage européen : « Ce trou dans le budget est apparu de lui-même et disparaîtra également tout seul. » C’est faux. Depuis la crise du coronavirus, nous sommes plongés dans une nouvelle réalité. Avec la hausse des taux d’intérêt, la dette publique pèse comme une épée de Damoclès sur les États membres. Des pays comme l’Italie, mais aussi la Belgique, se retrouveront tôt ou tard dans le collimateur des marchés internationaux.
Opposition nord-sud
En Belgique, le clivage nord-sud se cristallise plus que jamais. La ligne de fracture politique européenne passe par la Belgique et le paysage des partis. Le président de Vooruit Conner Rousseau a appelé cette semaine à un cadre fiscal moins rigide pour permettre l’investissement. Il est clair que nous devons continuer d’investir, mais s’il ne s’agit que d’une excuse pour creuser encore plus les déficits, cela revient à jouer avec notre prospérité future. Le proverbe « Gouverne ta bouche selon ta bourse » ne fait visiblement pas partie du manuel économique des socialistes.
Les points de vue de la Flandre et de la Wallonie par rapport à une politique fiscale responsable et à la préservation de la prospérité de nos citoyens sont également très éloignés l’un de l’autre. La Flandre se tourne vers le nord et préconise une gestion responsable de l’argent des contribuables. L’assainissement des comptes reste en effet la meilleure assurance contre les crises futures et doit permettre d’investir dans les défis sociaux à venir.
Au sud de la Frontière linguistique La frontière linguistique entre la région Flamande et la région Wallonne a été fixée définitivement durant la période 1962-1963. L’arrondissement de Bruxelles-Capitale est officiellement bilingue. La frontière linguistique n’est pas une invention flamande. Les francophones, et surtout les socialistes, ont voulu dès le début du 20ème siècle que soient créées des régions unilingues en Belgique. Aujourd’hui, les Flamands souhaitent que la frontière linguistique et le bilinguisme de Bruxelles soient respectés. frontière linguistique , on préfère lâcher la bride. Plutôt que de procéder aux réformes nécessaires pour assurer notre prospérité, les francophones souhaitent adapter les accords européens eux-mêmes. Cela fait si longtemps que nous enfreignons les règles imposées, autant les changer en fonction de notre non-politique... Tel est le credo des francophones.
Je vous épargnerai les détails techniques de la machine décisionnelle européenne. Jusqu’à nouvel ordre, la position financière et budgétaire de l’Europe sera exposée par mon collègue fédéral. De nombreuses réunions doivent être organisées afin de trouver une position commune avec les entités fédérées. Et c’est là que le bât blesse. Les visions, les coutumes, les réalités économiques et les constellations politiques sont si éloignées les unes des autres que la Belgique ne peut plus prendre position.
Nous nous retrouvons ainsi sans voix ni vision claire à la table européenne et devons accepter ce que les autres États membres nous imposent. Une situation qui contraste fortement avec celle d’autres États plus petits, comme les Pays-Bas et le Danemark, qui n’hésitent pas à se faire entendre.
Faire front
Le fait que nous soyons réduits au silence en tant que membre du club européen est déjà un triste spectacle. Mais nous retrouver les mains vides, selon toute vraisemblance, lors de la présidence de l’UE est un nouveau coup dur pour la diplomatie fédérale. Je demande à mes collègues flamands au sein du gouvernement fédéral de faire front et de ne pas entraîner la Flandre dans le bourbier belge.
La position wallonne et bruxelloise de laisser-faire budgétaire a longtemps imprégné la logique fédérale. Aucune tentative crédible n’a été faite au cours de cette législature pour remettre un peu d’ordre dans les choses. À Bruxelles et en Wallonie, on ne fait d’ailleurs même plus semblant. Plus la discorde entre Flandre et Wallonie se prolongera, plus la Belgique risque de se retrouver dans le collimateur des marchés internationaux.
Nous figurons parmi les plus mauvais élèves de la classe. La fête belge s’achèvera bientôt, soit parce que les marchés internationaux viendront s’y immiscer, soit parce que nous aurons organisé notre propre descente vers l’abîme. Il est incompréhensible et politiquement intenable pour mes collègues flamands au sein du gouvernement fédéral de ne pas renforcer les règles budgétaires et d’accompagner les politiques à court terme de nos voisins wallons. Cela montre une fois de plus que le modèle belge est arrivé en bout de course.