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Le projet de loi pandémie du gouvernement fédéral confirme les craintes de la N-VA : « Cela ne va vraiment pas dans le bon sens »
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« Jusqu’où ira le gouvernement dans la négation du rôle du parlement ? » Le chef de groupe N-VA au parlement fédéral Peter De Roover voit ses craintes confirmées par le projet de loi pandémie du gouvernement fédéral. La majorité a tout bonnement refusé de traiter en urgence la proposition de loi de crise de la N-VA.
D’après les médias, le gouvernement aurait enfin élaboré un projet de loi pandémie. Sur la base de ce qu’elle a pu lire, la N-VA voit ses craintes confirmées : il s’agit d’une loi de pouvoirs spéciaux. « Cela ne va vraiment pas dans le bon sens », estime le chef de groupe Peter De Roover, qui avait introduit sa propre proposition cette semaine. Dans la proposition de la N-VA, la Chambre conserve le pouvoir de décision en cas de crise persistante. Les critiques du groupe N-VA et de nombreux acteurs extérieurs au parlement ont poussé le gouvernement à enfin agir. Mais comme l’avait déjà expliqué Peter De Roover, ce n’est pas parce qu’une initiative juridique est enfin prise qu’elle offre forcément la bonne solution.
Le gouvernement fédéral fait fi des critiques et objections de son propre camp
« Les critiques de l’ancien ministre de la Justice Koen Geens lors des Grandes Conférences Catholiques la semaine dernière étaient visiblement fondées », explique De Roover. « Cette loi pandémie tente déjà de définir quelles mesures seront nécessaires à l’avenir et risque d’être systématiquement dépassée ou interprétée de manière excessive pour justifier le fait que le gouvernement s’octroie le pouvoir de décision sans tenir compte du parlement, y compris en cas de crise à long terme. » Pour l’ancien ministre Geens, il aurait mieux valu permettre au parlement de se prononcer sur des mesures spécifiques et adaptées à la situation. « Le législateur peut tout à fait voter des lois en urgence une fois les besoins connus. Après les attentats, le parlement a voté une trentaine de mesures adaptées. Nous avons renforcé la sécurité dans le respect des droits de l’homme », explique De Roover. « Notre proposition s’inscrit entièrement dans ce cadre et est dans la droite ligne des objections soulevées par Johan Vande Lanotte il y a quelques jours. »
Jusqu’où ira le gouvernement dans la négation du rôle du parlement ?
Pour De Roover, la question est la suivante : le parlement sera-t-il laissé de côté dans les situations de crise, le gouvernement étant seul aux commandes, ou bien les représentants du peuple pourront-ils décider des questions cruciales qui touchent aux libertés et aux droits fondamentaux, le gouvernement étant chargé de l’exécution des mesures prises de manière démocratique ? « Je me demande si les libéraux, mais aussi les écologistes et les chrétiens-démocrates, vont permettre l’instauration d’un régime de pouvoirs spéciaux invoqués par le gouvernement. Ils ont déjà dû accepter de voir "leur" gouvernement être traduit en justice par la Ligue des droits humains et des représentants des barreaux déclarer que "leur" gouvernement mettait l’état de droit sous respirateur. Jusqu’où ira le gouvernement dans la négation du rôle du parlement ? »
La majorité Vilvaldi refuse de traiter en urgence la proposition de la N-VA
Le gouvernement affirme que la balle est désormais dans le camp du parlement et que c’est de lui que dépendra la rapidité de concrétisation de la loi. « Étrange », estime De Roover, « car hier, nous avons invoqué l’urgence pour notre proposition afin qu’elle puisse être traitée en commission la semaine prochaine. Malheureusement, les partis de la majorité ont tout bonnement rejeté notre demande. »
Tous les groupes doivent se prononcer clairement
Le chef de groupe N-VA se dit prêt à aller au cœur du débat et entend bien demander à l’ensemble des groupes de se prononcer clairement sur le rôle des représentants du peuple lorsque les droits les plus élémentaires sont remis en question.
Comparaison
La comparaison des textes du gouvernement (pas encore définitifs, espérons-le) et de la N-VA montre que chaque camp part d’une vision fondamentalement différente du rôle du parlement en cas de situation de crise à long terme. Que chacun juge par lui-même :
Loi pandémie du gouvernement De Croo |
Loi de crise de la N-VA |
Uniquement en cas de situation d’urgence épidémique |
Pour toute situation de crise |
Promulgation par AR, avec ratification par la Chambre |
Situation de crise proclamée par une loi, à l’initiative du gouvernement ou de la Chambre |
Délégation (pouvoirs spéciaux) au ministre de l’Intérieur, qui peut prendre les mesures qui s’imposent (avec énumération) |
Pas de délégation au gouvernement, sauf pour un maximum de 7 jours en cas d’urgence |
Les mesures (couvre-feu, rassemblements, fermeture des frontières, fermeture des entreprises...) ne sont pas soumises pour approbation à la Chambre, qui peut ensuite éventuellement les lever dans les 10 jours |
Les mesures sont soumises pour approbation à la Chambre, qui se prononce dans les 7 jours |
Pas de débat ni de possibilité d’ajout ou de correction préalable par la Chambre |
Débat approfondi à la Chambre |
Les mesures ne peuvent pas être soumises à la Cour constitutionnelle |
Les mesures, ratifiées sous forme de loi, peuvent être soumises à la Cour constitutionnelle par les citoyens |
Pas d’avis du Conseil d’État |
Avis du Conseil d’État en procédure d’urgence |
Loi pouvoirs spéciaux |
Alternative à une loi de pouvoirs spéciaux |
Dispositions pénales prévues |
Pas de dispositions pénales, car pas de mesures concrètes évaluées lors de la soumission à la Chambre |
Rapport mensuel (= ?) à la Chambre à propos des mesures |
La Chambre décide des mesures à prendre |