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Valerie Van Peel : « Ce scandale, nous l’avions vu venir depuis dix ans »

Depuis plus d’une décennie, la présidente Valerie Van Peel tire la sonnette d’alarme sur l’anonymat des donneurs et le manque de contrôle sur les dons de sperme. « Pendant des années, nous avons prêché dans le désert. Et aujourd’hui, ce que nous avions prédit depuis tout ce temps se réalise », déclare-t-elle dans Villa Politica.
« Les droits des enfants ignorés pendant des années »
Dès 2015, Valerie Van Peel a déposé une proposition de loi visant à créer une base de données permettant de suivre combien de femmes recourent au même donneur de sperme. Cette mesure devait permettre une meilleure application de la règle des six femmes, en vigueur depuis 2007.
« Mais cette proposition allait bien plus loin », précise-t-elle. « Elle visait aussi à lever l’anonymat des donneurs, afin que les enfants puissent enfin connaître leurs origines. Aujourd’hui, ils restent les seuls dans notre société à qui ce droit est légalement refusé. »
« L’Open Vld a bloqué toute avancée pendant des années »
Valerie Van Peel n’épargne pas son ancien partenaire de coalition. « L’Open Vld a systématiquement bloqué toute progression. Jean-Jacques De Gucht et la baronne Sabine de Bethune suivaient ce dossier. De nombreux débats ont eu lieu, y compris avec la ministre Maggie De Block. Ils ont toujours minimisé l’importance des droits de l’enfant, affirmant que le droit à avoir un enfant devait primer. Or, ce droit n’existe même pas juridiquement. »
Elle cite des exemples à l’étranger, comme celui des Pays-Bas, où un médecin en fertilité a engendré clandestinement plus d’une centaine d’enfants. « Le schéma est toujours le même : un secteur qui refuse d’abord toute réforme, puis, dès que les choses commencent à bouger, les témoignages affluent. »
Un consensus politique enfin en vue
Aujourd’hui, un consensus politique semble enfin émerger pour mettre fin à l’anonymat des dons. « Mais c’est amer », regrette Valerie Van Peel. « Des familles pensaient vivre une belle histoire, et se réveillent aujourd’hui avec le sentiment d’avoir été trompées. Et beaucoup savaient depuis longtemps que cela finirait par arriver. »
« Une commission d’enquête parlementaire ? Je n’exclus rien »
L’Agence fédérale des médicaments et des produits de santé (AFMPS) est elle aussi dans le viseur. « La présidente de l’asbl Donorkinderen a transmis, pendant des années, des dossiers prouvant que des choses tournaient mal. Elle a toujours été ignorée. En avril dernier, ma collègue Frieda Gijbels a encore interrogé l’agence sur l’identification de donneurs “massifs”. La réponse fut évasive. »
Valerie Van Peel compte suivre de près l’audit annoncé au sein de l’AFMPS. « Cet audit doit véritablement avoir lieu. Et il faudra en tirer les conséquences. »
Même une commission d’enquête parlementaire n’est pas exclue à ses yeux : « Je ne rejette aucune option. Je suis heureuse que toute la lumière soit enfin faite sur ce dossier. Mais j’ai bien peur que ce ne soit que le début. »