L’État belge perd des millions d’euros à cause des travailleurs indépendants étrangers

6 décembre 2023
Katrien Houtmeyers

Les responsables politiques observent sans réagir les abus massifs du statut d’indépendant par des non-Belges. La perte au niveau des cotisations sociales se chiffre en centaines de millions d’euros. Près de la moitié des nouveaux indépendants entre 2019 et 2021 n’avaient pas la nationalité belge. Parmi eux, plus d’un tiers n’ont jamais payé de cotisations sociales. « Une tendance inquiétante qui désavantage notre pays sur le plan financier et nécessite une approche plus stricte que celle proposée aujourd’hui par le ministre Clarinval », réagit la députée fédérale Katrien Houtmeyers.

Il y a un an, les statistiques de l’INASTI faisaient déjà état d’une augmentation notable du nombre de travailleurs indépendants étrangers en Belgique. Katrien Houtmeyers avait alors interrogé le ministre des Indépendants David Clarinval (MR), qui reconnaît aujourd’hui des abus généralisés.

Jamais payé de cotisations sociales

Selon des chiffres récents du Comité général de gestion pour le statut social des travailleurs indépendants, on a dénombré 169 501 nouveaux indépendants en Belgique entre 2019 et 2021, dont 79 091 non-Belges, soit près de la moitié. 38,3 % de ces non-Belges (plus de 30 000 personnes) n’ont jamais payé de cotisations sociales. Parmi les Roumains, qui représentent près de la moitié des non-Belges nouvellement inscrits, 52,5 % n’ont jamais versé de cotisations. Tous ces chiffres jettent une ombre sur le taux d’emploi dont se targue le gouvernement.

Systèmes de fraude complexes

« Ces travailleurs indépendants étrangers se désinscrivent souvent au bout de quelques mois et disparaissent sans laisser de traces », explique Houtmeyers. Ces abus servent plusieurs objectifs, comme l’obtention d’un droit de séjour de plus de trois mois et les avantages sociaux et fiscaux tels que les allocations familiales. Il s’agit de systèmes de fraude complexes appliqués à grande échelle depuis des années. Le recouvrement de ces cotisations sociales en souffrance à l’étranger étant quasiment impossible, notre pays y perd des centaines de millions d’euros. « Une honte vis-à-vis de tous les indépendants qui travaillent dur et paient correctement leurs cotisations. »

Bonne intention mais inefficace

Le ministre Clarinval a annoncé des mesures afin de lutter contre ces abus. Un registre des associés actifs et des aidants sera créé, ainsi qu’une Obligation Une obligation est un prêt accordé à une entreprise ou à une autorité qui est remboursé avec un intérêt. Contrairement aux actions, la plupart des obligations ont une durée et un intérêt fixes. Cet intérêt est généralement payé annuellement. De ce fait, les obligations impliquent en règle générale un risque moindre que les actions. obligation de retenue en cas de dettes sociales. « L’intention est bonne, mais ce système est inefficace, trop complexe et comporte de trop nombreuses exceptions », explique Houtmeyers. « L’obligation de retenue ne sera par exemple appliquée qu’aux secteurs de la construction et du nettoyage alors que les fraudeurs peuvent facilement changer de secteur. Et sans échange de données en temps utile entre les caisses d’assurance sociale, les cas de fraudes ne sont décelés que lorsque les escrocs se sont déjà envolés. »

Intervenir plus rapidement

Houtmeyers s’étonne également que nous versions indûment de l’argent et devions ensuite payer des personnes pour tenter de le récupérer, avec de faibles chances de succès. « Les autorités doivent intervenir plus rapidement pour éviter que ces abus du statut d’indépendant ne se poursuivent. »

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